Anne-Sophie Thelisson

2 min.

17 novembre 2022

Par Anne-Sophie Thelisson, docteure en sciences de gestion, enseignante-chercheuse à ESDES Business School et Olivier Meier, professeur des Universités à l'Université Paris Est Créteil.

Le dirigeant fondateur d’une entreprise familiale peut être amené à transmettre son pouvoir à un autre membre de la famille lors d’une succession. Un changement à risques pour l’entreprise, qui suppose un certain nombre de précautions.

Les entreprises familiales occupent une place économique essentielle en France. Selon une étude du Crédit Mutuel de 2017, 55 % des entreprises de taille intermédiaires (ETI) sont ainsi des sociétés familiales. Or, à l’heure de la transmission dans le cadre d’une succession, les dirigeants fondateurs de ces entreprises doivent souvent relever plusieurs défis liés aux facteurs psychologiques, culturels et émotionnels auxquels ils sont confrontés, notamment si le changement de direction se fait au sein de la famille.

 

Chercher de nouveaux repères

D’abord, le dirigeant cédant court le risque de perdre une partie de son pouvoir et de son influence, fruits d’un statut naturellement attribué que l’environnement social et familial avait admis et légitimé. Cette perte pousse généralement le cédant à vouloir conserver un pied dans l’entreprise.

Ensuite, le dirigeant cédant peut craindre de perdre son utilité économique et sociale. Admettre un successeur, c’est aussi reconnaître que l’on n’est plus indispensable et qu’il existe un substitut capable de mener à bien l’activité.

Enfin, le dirigeant cédant risque d’être confronté à une perte de sens et de repères. Lorsqu’on dirige une entreprise, une grande partie de son temps et donc de sa vie sociale est consacrée au développement et à la gestion de cette entreprise, et les relations avec les autres membres de la famille sont souvent organisées autour de l’entreprise. Or, du jour au lendemain, tout prend fin. On doit dès lors se réinventer, retrouver ses marques, chercher de nouveaux repères.

Favoriser le passage de témoin

Tous ces facteurs psychologiques et culturels sont essentiels car ils pèsent sur la qualité des relations entre le dirigeant cédant et son successeur familial. Ce dernier devra vérifier que le cédant est psychologiquement prêt à céder son affaire, au-delà de toute considération stratégique et économique, pour que la transmission puisse s’opérer dans de bonnes conditions. Il devra également démontrer au cédant une certaine proximité dans la façon dont il perçoit le métier et compte valoriser l’entreprise, afin d’éviter que la reprise soit synonyme de remise en cause personnelle ou professionnelle du cédant. Enfin, le nouveau dirigeant aura intérêt à éviter les changements trop radicaux en favorisant des ponts entre le présent et le futur (au moins au cours des premiers mois), en veillant à ne pas heurter les croyances et les valeurs du fondateur et de ses salariés qui lui sont restés fidèles, tant sur le plan personnel que professionnel.

Une solution peut être d’ailleurs de recruter son prédécesseur en tant que salarié ou d’identifier des acteurs relais qui connaissent bien l’entreprise et sauront accompagner le passage de témoins entre les deux dirigeants.

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